Histoire des psychothérapies16 minutes de lecture

Origines

Antiquité

Les traitements par le corps et l’esprit son étroitement lié (hipocrate). On soigne par le corps, l’esprit et l’art. Platon emploie la musique, pour aristote l’art est mimésis et permet d’expurger (catharsis). Sénèque guérit par la correspondance, Cicéron considère la philosophie comme la meilleure médecine. Malgré la similarité des moyens, toutes ces méthodes sont directives et donc non comparables à la conception actuelle.

Le moyen âge

Les problèmes de la vie psychique sont traités par les théologiens, qui considèrent que l’âme et le désir (saint augustin) est toute puissante sur le corps. Ils distinguent folie et stupidité, et traitent selon les méthodes grècques. Au cours des XIVe et XVe, l’église domine la question, et défini l’anormalité comme trouvant son origine dans l’action de satan et ses suppots. L’âme est sauvée en brulant le corps.

La renaissance

Les procès en sorcellerie se poursuivent en particulier pour les femmes, on distingue les fous de satan et les fous naturels, ces derniers étant définis par une libération des normes, une aptitude à agir d’instinct. Les premiers hopitaux psychiatriques sont créés en espagne par le Père Jean Joffres puis l’ordre de Saint Jean de Dieu. Le traitement est effectué par la coercicion et le traitement par les contraires.

XVIIe siècle

l’arret des proces en sorcellerie est compensé par le grand enfermement de toute personne inquiétant la bourgeoisie (mendiants, prostituées, fous) et les méthodes galéniques (purges). on soigne par le travail, les bains, la contention.

XVIIIe siecle

Le courant humaniste prône une attitude plus humaine envers le malade (Locke, Condillac, Rousseau). Le terme névrose apparait (wiliam cullen) pour désigner toutes les maladies mentales.

Les rémissions spontanées observées conduisent à une position « laisser faire » de la médecine, en parallèle à un déploiement de l’hydrothérapie, la diète, l’opium, l’électrisation, la contention et le travail… benjamin Rush conseille d’écouter et parler aux délirants, de les ramener à la raison par des scénarios et tromperies naives. Les soins de contraintes sont maintenus pour les patients agités. Philippe Pinel prone le traitement moral, car l’aliéné conserve toujours un reste de raison.

L’origine de la maladie mentale est recherché au niveau biologique, et particulièrement neurologique, ce qui amène à des méthodes comme la chaise tournante, et des théories comme la phrénologie (Gall), la physiognomonie (Lavatier) et les conceptions anthropologiques du criminel (Lombroso), développées dans une préoccupation nosographique et sémiologique.

Le magnétisme animal de Mesmer introduit à paris, postulait l’existence d’un fluide universel favorisant les influences réciproques. La maladie mentale serait une dysharmonie du fluide vital, et pouvait donc être guérie grâce à des aimants, magnétiseur et autre conducteur. Il est à la source de l’emploi de la suggestion, observée par son disciple Armand Chastenet de Puységur.

Evolution récente des psychothérapies

XIXe siècle

La souffrance physique et morale cotoie dans le traitement la « conversation intime et quotidienne avec le malade » préconisée par Paul Dubois. le théatre, la musique (bals, concerts), des journaux sont organisés à des fins thérapeutiques.

Les institutions psychiatriques se voient dotées d’un cadre légal assurant les droits des patients. Les modalités d’internement sont supervisées par l’autorité publique. De nouveaux asiles sont créés, et on passe de la conception de cellules à celle de dortoirs, cependant, les démarches de soin stagnent.

James Braid, s’appuyant sur les travaux en magnétisme animal, élabore une méthode de sommeil provoqué, et créé le la notion « d’hypnotisme » dont il entrevoit les applications thérapeutiques. Broca et azam relancent dans les années 50s l’intérêt de l’hypnose comme méthode anesthésique en chirurgie. L’école de la salpétrière et Charcot en fait vite l’apanage de l’hystérie, montrant des déplacements des symptomes par l’hypnose. Au contraire, L’école de Nancy et bertheim la décrivent comme processus et action thérapeutique, consacrant pour la première fois le terme de psychothérapie.

XXe siecle

L’hypnose est abandonnée au profit de l’association libre à la suite de freud, et ses notions de relation transférentielle, de conflit, de catharsis, de résistances etc. L’inconscient est au centre de tous les intérêts, et les différents disciples de Freud effectuent une variante d’apports (Jung, Adler, Ferenzi, Rank, Reich…). L’expression de psychothérapie psychanalytique apparait après les travaux auprès d’enfants de Anna freud et Mélanie Klein ; les thérapies médiatisées voient le jour, comme l’art thérapie, le psychodrame, le rêve éveillé dirigé, le training autogène… Le terme provient de Francois granier, qui s’en est servi en remplacement d’art thérapie en 1987.

Les psychothérapies institutionnelles voient le jour et l’asile s’humanise en devenant hopital psychiatrique.

Les psychothérapies sont reconnues paradoxalement avec l’avènement des neuroleptiques (Largactil 1952) et des antidépresseurs (trofanil, 1955) qui rendent curable les patients inaccessibles au soins jusque là. La pédopsychiatrie est dorénavant reconnue comme spécialité.

La psycholotérapie se prolonge dans des mouvements de développement personnel, notamment a travers les nouvelles thérapies développées par le centre de développement du potentiel humain, aux USA, dans une psychologie humaniste privilégiant authenticité et créativité, réalisation de soi et non directivité dans une dynamique de groupe non directive.

De nos jours, se cotoient thérapies cognotivo-comportementalistes, psychothérapies intégratives et thérapies médiatisées. La psychanalyse au sens de cure s’adresse de plus en plus à des sujets bien portants, dans un rapprochement général de thérapie et développement personnel. La psychanalyse n’est plus le seul modèle théorique fécond en méthodes.

Il existe un véritable marché de la psychothérapie, ce qui implique la nécessité d’une évaluation des différentes techniques, et une reconnaissance de la profession de psychothérapeute, passant par un encadrement législatif en cours, dans l’espoir de régler nombre de dérives et de clarifier les places des différentes spécialités qui se la disputent.

La psychothérapie est un concept polysémique.

Sa définition dans les dictionnaires communs entre les années 20 et 60 dans le petit larousse de « traitement des psychoses » à « traitement par des méthodes psychologiques », pour devenir en 1997 une « thérapie par des moyens psychiques, fondée généralement sur la relation personnelle qu’entretiennent le thérapeute et le patient. »

Le petit robert la pose comme « toute thérapeutique par des procédés psychiques », et même s’il fait une distinction entre son utilisation en psychiatrie et en psychanalyse, elle laisse la porte ouverte a tout les pratiques les plus triviales.

L’encyclopédie universalis la définit en 1995 comme « un traitement opérant par des procédés psychologiques » qui « s’opposent aux actions physico-chimiques », elle englobe « toute information du milieu, ce qui engloberait les diverses formes d’apprentissage et de conditionnement.. On réservera donc le terme de psychothérapie aux effets de la relation qui s’établit entre le patient et le thérapeute. »

Dans les dictionnaires spécialisés, le terme est bizarrement absent (dictionnaire de la psychanalyse, dictionnaire usuel de psychologie, dictionnaire fondamental de la psychologie…), ce qui pose des questions concernant la place respective de la psychothérapie et de la psychanalyse. Ce n’est que dans le vocabulaire de la psychanalyse de Laplanche et Pontalis que l’on trouve une définition : « Au sens large, toute méthode de traitement des désordres psychologiques et corporels utilisant des moyens psychologiques, […] en ce sens, la psychanalyse est une forme de psychothérapie. » Tout en s’y opposant souvent. « Sous le terme de psychothérapie analytique, on entend une forme de psychothérapie qui s’appuie sur les principes théoriques et techniques de la psychanalyse, sans cependant réaliser les conditions d’une cure psychanalytique rigoureux ».

Cette définition datant de 1967 est toujours d’actualité.

Classification pragmatique en 5 niveaux des psychothérapies selon Chambon et Marie-Cardine

Olivier Chambon et Michel Marie-Cardine distinguent 5 niveaux de psychothérapies qui tiennent compte du processus relationnel engagé, du degré de formalité de la relation et de l’aspect contenant du cadre. Réaliser une classification globalisante des thérapies en fonction de ses moyens, objets, fonctions, et buts (Moro et Lachal) semble plus pragmatique, mais cette approche négligerait des éléments constitutifs importants.

Le niveau 1 ou aide psychologique de la vie courante

L’aide psychologique est un soutien apporté par les relations humaines. Il prend place en dehors d’un cadre thérapeutique.

Le niveau 2 ou attitudes psychothérapiques ou « psychologie médicale »

Le niveau 2 est un processus relationnel dans le cadre d’un soin où la place des effets psychologiques n’est pas centrale, ni explicitée. Par exemple, le soin peut passer par l’attitude d’enseignants, avocats, infirmières ou assistants sociaux. Dans un contexte médical, elle peut passer aussi par l’incitation à observer une ordonnance, ou l’institution d’un effet placébo par le médecin.

Le niveau 3 ou psychothérapies spécifiques ou systématisées

Les psycho-thérapies spécifiques sont classées selon le critères habituels d’auteurs. Elles se basent sur des références théoriques et des mode de communication pré-définis. La durée, forme, et nombre de participants peuvent varier. On divise ce niveau en deux extrêmes d’un même continuum, pour en distinguer l’ensemble.

Le niveau 3a correspond au counselling

Le counselling s’adresse à des clients jouissant d’une expérience de soi non pathologique. Ils traitent des problemes comportementaux de nature principalement instrumentale, relevant de l’actualité. La demande posée est concrète et claire. Le but du thérapeute sera d’y répondre. Pour ce faire, il fera acquérir au sujet des savoirs, aptitudes. Le sujet améliorera ainsi ses capacités adaptatives.

Le niveau 3b correspond à la psychothérapie

La psychothérapie traite des clients à l’expérience de soi gravement perturbé. Ces personnes présentent des comportements problématiques de nature affective et personnelle, relevant du développement. La demande est plus complexe. La pychothérapie intervient lorsque l’aide éducative ne suffit plus. Elle centre  son travail sur les résistances du sujet. Elle tente de les dénouer avec une logique spécifique, comme l’asociation libre, la connotation positive. L’injonction paradoxale, la réactivation intentionnelle de la crise sont aussi utilisées…

Le niveau 4, ou psychothérapies intégratives et éclectiques

Ces psychothérapies s’étayent sur des recherches révélant des facteurs communs (30%) et des facteurs spécifiques (15%) dans les effets des thérapies. L’alliance aidante est le principal indicateur de réussite d’une technique. Ces psychothérapies font preuve d’éclectisme au niveau technique. Elles associent différentes techniques en parallèle ou successivement.

Le courant de l’intégration théorique met l’accent sur l’intégration des différentes théories sous-jascentes : « L’éclectisme technique amène a composer un menu avec divers plats. L’intégration théorique conduit à réaliser un nouveau plat avec différents ingrédients » (Nocross 1998)

Ce niveau inclut par exemple par des thérapies intégratives brèves et les thérapies cognitivo-analytiques. Elles allient la collaboration active et explicite des TCC (thérapies cognitives comportementales) avec les notions d’inconscient et de transfert de la psychanalyse pour modifier les conduites dysfonctionnelles.

Le niveau 5 ou thérapies institutionnelles se divise en trois types

  • L’hospitalisation constitue le type I.
  • Le type II fait référence aux psychothérapies d’ambiance ou de milieu. Elles se déroulent sans intervention spécifique et dans des références théoriques diversifiées.
  • Le type III correspond aux psychothérapies pratiquées dans l’institution. Elles sont dispensée de manière autonome. Parfois, elles sont sans lien avec la dynamique institutionnelle. Parfois, elles sont en interaction avec les autres démarches.

Classification des psychothérapies selon le degré de force du moi

Une classification clinique globale est aussi envisageable en fonction du degré de force du moi, c’est à dire de la stabilité et adaptation émotionnelle dont fait preuve la personne face à des stresseurs psychosociaux. Elle regroupe les psychothérapies en trois catégories non étanches.

Les méthodes de stabilisation du moi (ego faible, stabilizing)

Elles sont composées d’approches douces, visant à améliorer le fonctionnement de l’ego, en agissant sur le contrôle émotionnel, les défenses, la résolution de problèmes et le sens de la réalité, les stratégies d’adaptation et l’autro-contrôle. Elles le font en évitant les distorsions de transfert. Les techniques employés ne favorisent pas la régression. Elles stimulent peu émotionnellement et évitent de fragiliser les défenses. L’apport psycho-éducationnel est donc progressif, contenant et étayant. Il permet par exemple d’améliorer l’observance médicale et de prévenir les rechutes etc.

Les méthodes de soutien au développement du Moi (Ego modéré, murtuting),

Elles se centrent sur le développement d’un Soi sain à travers l’Insight, la compréhension de soi, l’estime de soi. Elles confrontent le sujet aux difficultés rencontrées pour les élaborer dans un cadre contenant. Il s’agit d’un temps de développement personnel mené à travers une expérience émotionnelle correctrice. Ces méthodes permettent d’explorer prudemment les émotions et traumatismes passés. Elles amènent le sujet à explorer et dialoguer avec ses imageries.

Les méthodes de remise en cause du Moi (ego forts, ego challenging),

Elles poussent le sujet à s’interroger sur les conséquences et ramifications de ses pensées et comportements. Elles demandent des potentialités cognitives et introspectives chez le sujet. Elles amènent à une identification et confrontation aux défenses, aux émotions dramatisées.  Elles conduisent à une prise de conscience avec insight et à un dégagement d’un soi sain des relations internalisées qui le parasitent. Ces méthodes agissent par la compréhension du passé. Ces techniques se résument en trois mots clés : clarification, confrontation et interprétation.

Attention a ne pas confondre psychothérapies et thérapies.

Ces deux termes sont sujet à usage abusif. Même regarder la télé devient « thérapeutique ». La thérapie est à distinguer du développement personnel. Il s’agit là d’une question d’actualité, et d’un enjeu de santé publique, universitaire et professionnel.

La profession de thérapeute est encore de nos jours entourée d’un flou. Les psychiatres, psychologues, psychanalystes, psychothérapeutes se la disputent. La loi sur la santé publique 2004 clarifie les pré-requis pour disposer du titre. Elle lui confère un statut juridique. La loi définit les formations et conditions requises pour en faire usage. Suivre les cours sur ce blog ne fera pas de vous un thérapeute. Cela peut cependant vous aider à acquérir le diplôme qui vous donnera ce statut. Il s’agit surtout d’une aide pour acquérir une bonne partie des connaissances requises.

Indications et contre indications

En employant ces termes, nous flirtons avec le registre médical, dans la continuité du désir de la psychologie à appliquer une méthode scientifique. En nous basant là dessus, le choix d’une thérapie devrait dépendre (Huber) des résultats des recherches scientifiques à son sujet, de l’existence d’une technique spécifique pour un trouble donné et des données comparatives de plusieurs techniques si celles ci permettent de traiter un même trouble. Cependant, ce choix est a moduler par les réalités du terrain, ce qui lui confère une dimension créative : en effet, dans la pratique, le praticien a souvent recours a une combinaison d’éléments et de techniques efficaces, adaptées ou aménagées face à la situation de résolution de problème qu’est la confrontation au patient. Celle ci amène à adopter des réponses créatives telles que des stratégies combinatoires, d’analogie ou de dissociation, etc. Le psychothérapeute se situe au confluent d’une position d’artisan et de créateur.

La connotation médicale de ces termes implique la recherche d’une association entre technique et trouble : c’est la recherche de l’application d’une technique pour un trouble donné, dans une démarche scientifique rationalisante. Or, cela peut conduire à des dangers. Par exemple, les TCC se sont avérées très efficaces dans le traitement des TOCs (75% de réussite), mais une orientation systématique vers ce type d’approche reviendrait à négliger l’erreur clinique, et les 25% de sujets répondant moins bien à cette pratique. De plus, la combinaison entre les TCC avec l’emploi d’antidépresseurs s’avère extrêmement efficace.

L’utilisation d’arbres décisionnels froids remet en question la singularité du sujet et l’approche du sujet supposé savoir de la psychologie, amenant éventuellement à négliger la dynamique tranférencielle, et permettant à un praticien mécaniciste de projeter confortablement l’échec d’une démarche sur le patient. Malheureusement, si cela protège l’ego do thérapeute, cela se afit au dépends du sujet souffrant qu’est le patient.

Il est aussi des questions obsolètes qui persistent. C’est notamment le cas de l’interférence de stéréotypes dans la perception du patient. Un psychothérapeute aura tout intérêt à confronter cette représentation, car si la réussite d’une thérapie est légèrement corrélée à l’éducation et la scolarité du patient, il doit garder à l’esprit que l’âge, la classe sociale, ou la catégorisation YARVIS (jeune, attrayant, riche, verbalement doué, intelligent et accompli professionnellement) ou HOUND (casanier, vieux, sans succès, verbalement et intellectuellement peu doué) ne doit pas interférer dans les décisions du thérapeute.

Ceci est décrit dans le cours de façon très engagée et ironique, comme mécanisme de défense du praticien. sans aller jsqu’à cet extrême, des stéréotypes (type, ce qui est beaux est bon) s’avèrent opérationnels dans nombre de situations cliniques.

Il faut cependant prendre en compte les capacités du sujet à être en contact avec lui même, c’est à dire son ouverture à ses propres sentiments, sa capacité à verbaliser et sa potentialité à ressentir et exprimer ses affects, dans le choix d’une thérapeutique. par exemple, les patients externalisateurs (privilégiant des causalités externes à sa situation) répondent mieux aux psychothérapies directives, et inversement pour les internalisateurs.

Côté praticien, il faut prendre en compte son appartenance à une école théorique, son expérience et compétence, son engagement dans la thérapie et son éventuel trajet didactique.

Enfin, la gravité du trouble ne doit pas être sous estimée, et il ne faut pas négliger l’intégrité du corps bio-physiologique du sujet dans sa prise en charge. L’approche holiste prend ici tout son sens, et cela montre bien l’intérêt d’effectuer un travail psychothérapeutique au sein d’une équipe ou d’un réseau (pluridisciplinaire).

Il faut souligner qu’il est difficile de mettre en évidence des contre indications, la place irréductiblement singulière de l’inter action patient-thérapeute, et donc poser la question en ces termes (de G.L.Paul) :
Quel traitement, par quel thérapeute, est le plus efficace pour quel sujet, dans quel problème, dans quelles circonstances, et comment?

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