Winnicott et la mère sufisamment bonne4 minutes de lecture

Winnicott étudie l’enfant dans sa relation à la mère

Winnicott (1896-1971) est pédiatre de formation, devenu psychanalyste pour enfants en s’inspirant de Klein. Il est à l’origine de l’affirmation qu’il n’y a pas d’enfant tout seul, insistant sur l’apport de l’environnement primaire.

La mère suffisamment bonne

Le développement du concept de mère suffisamment bonne (good enough mother) se définit par trois actes nécessaires: le holding, le handling et l’object presenting.

Le holding a une valeur affective

Le holding, ou portage désigne la façon de porter l’enfant, de façon plus ou moins serrée contre soi, plus ou moins frôlant les murs avec la tête de l’enfant, il a une valeur affective. Le bon holding est celui de la mère: il est connu, rassurant. Il s’agit aussi d’une introduction du corps dans l’espace, il influe sur la gestion du risque et de la sécurité de l’enfant plus tard.

Le handling permet à l’enfant de dissocier son corps de l’environnement

Le handling est la manipulation de l’enfant, la façon d’agir sur lui dans le cadre du soin (nourrissage, toilette, soin du cordon). Ces soins sont investis de différentes manières par les parents, et comprend de nombreuses sensations tactiles et auditives pour le bébé. On encourage d’ailleurs les parents à masser leurs enfants dans un but d’apaisement. Le soin est aussi accompagné de parole, quoique la pudeur à exhiber le lien affectif le rend difficilement observable. C’est par le handling que l’enfant peut dissocier son corps de l’environnement.

L’object presenting aide l’enfant à découvrir le monde progressivement

L’object presenting est la présentation de l’objet. Elle aide à découvrir le monde par petit bouts, de façon prémachée, d’information sur l’environnement. Il existait un courant aux USA prônant l’hyperstimulation des bébés, en leur présentant des opéras, tableaux de grands maitres etc. Il faut savoir cependant que l’enfant préfère des présentations simples d’objets ayant un connotation affective plutôt qu’une culture froide et impersonnelle. L’enfant préfèrera regarder un dessin de son frère plutôt qu’une œuvre de Picasso.

L’enfant intériorise l’environnement dans la zone de transition

La zone de transition est la zone de chevauchement entre ce que l’environnement apporte et ce que l’enfant en fait (le remaniement intérieur en objets trouvés-créés). Le doudou est un objet transitionnel, il sert à incarner un bout de l’autre absent et qui est attendu.

L’enfant a besoin d’éprouver un manque pour sentir ses besoins et agir

L’idée de mère suffisamment bonne vient du fait qu’elle ne doit pas l’être trop. Si les parents comblent tous les besoins avant qu’ils se présentent, cela ne laissera pas à l’enfant l’occasion d’éprouver du désir.

Cela entraverait la capacité de l’enfant à élaborer face au manque par exemple, à sentir le besoin, à avoir envie de quelque chose, à agir. Il se fait alors l’objet du désir de l’autre. Il ne faut donc pas être trop bon non plus.

Une mère trop bonne ajoute à l’angoisse d’abandon, celle d’intrusion

L’enfant a déjà à s’occuper de l’angoisse d’abandon, et une mère trop bonne y ajouterait une angoisse d’intrusion ainsi qu’un renforcement de l’angoisse d’abandon. Il est important à ce niveau de comprendre qu’on ne peut pas rattraper sa propre enfance à travers celle de l’enfant. L’enfant doit apprendre à être soi, tout seul, en présence de l’autre.

Winnicott met en évidence la préoccupation maternelle primaire.

Le parent doit faire face à sa propre ambivalence

Le parent doit aussi faire face à sa propre ambivalence: la relation à l’enfant n’est pas tout amour, et une pulsion d’agressivité va s’exercer, notamment à travers, chez de nombreux jeunes parents, des rêves de mort de l’enfant, qui sont une façon d’exprimer cette part de nous.

Elle est perçue un peu comme la maladie de la relation avec l’enfant. Elle s’exprime par le fait, durant les moments périnataux, que la mère s’éveille juste avant son bébé, quelques seconde à quelques minutes.

La mère est hypervigilente et dépersonnalisée

La maman est hypervigilente et dépersonnalisée, et perçoit les micro mouvements de son enfant par empathie, lorsque celui ci commence à se réveiller. Cela permet la communication entre parent et enfant (cela peut aussi arriver au père).

La relation est thérapeuthique

Cela soulève la question de vivre avec l’autre, même à distance. Cette préoccupation est similaire en analyse, dans le sens ou l’on porte l’autre psychiquement. C’est thérapeutique d’être contenu dans l’appareil psychique de l’autre. Dans le cadre de la psychanalyse, il ne faut pas refouler les mouvements de pensée vers les patients, mais se demander pourquoi dans une situation particulière l’on a pensé à eux.

Lectures conseillées

Winnicott lui-même explique très bien ces concepts. Une traduction française de trois de ses textes est disponible. Le sujet de la mère suffisamment bonne est couvert par cette traduction de trois articles de Winnicott. Vous pouvez l’acheter ou prendre les références pour le retrouver dans votre bibliothèque universitaire. J’ai aussi particulièrement été intéressée par le livre traduisant des travaux de Winnicott sur les objets transitionnels.

6 thoughts on “Winnicott et la mère sufisamment bonne

  1. je ne suis pas sur que l’exemple de picasso soit très pertinant, car ces oeuvre sont élaborer et très peu d’entre elles sont non représentative…
    Ne parle tu pas plutôt de Miro!!!!

    MyHér
    (étudiante histoire de l art, anthropo, travail social)

  2. La remarque est bonne, dans le sens où, si j’ai bien compris, cela sous entend que lorsque j’évoque picasso, je ne pense qu’à ses dernières oeuvres, alors qu’il a fait beaucoup de concret. A vrai dire, ce n’est pas l’artiste en lui même qui est concerné et j’aurais aussi bien pu dire Miro, ou même Rembrandt. Ce qu’il faut surtout entendre derrière, c’est qu’il s’intéressera a des choses qui sont proches de lui, *parce qu’il est impliqué émotionnellement avec les personnes qui les ont faites. A l’inverse, aussi grand soit leur art, il ne fera pas attention aux chef d’oeuvres d’inconnus (inconnu signifiant ici : personnes sortant de son cercle de « proches »).

    En tout cas, merci de partager avec nous cette remarque. Il est toujours intéressant de confronter les disciplines.

    1. Merci! J’ai corrigé l’erreur et reformulé un peu la phrase pour la rendre plus compréhensible!

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *