Risky Shift – La prise de risque dans le groupe10 minutes de lecture

Le groupe n’a pas toujours un effet modérateur. Une première rupture sérieuse dans cette conception, montrant le déplacement d’un groupe vers le risque a été mis en évidence par Stoner. C’est le Riscky Shift. Il a été mis en évidence un suit pas un hasard scientifique. Il est observé la première fois par un étudiant du MIT en 1961.

La prise de risque dans le groupe est accentuée après discussion

Découverte du Risky Shift

Le Risky Shift est un effet d’accentuation de la valeur moyenne des recommandations de prise de risque dans un groupes suite à une discussion. Wallack, Kogan et Bem exposent ces travaux repris dans le texte « Group influence of individual risk taking ».

Inspiré de celui de l’étude princeps de Shérif, il reprend ses trois phases successives.

Pré-consensus

Dans un premier temps, les sujets fournissentt une série d’appréciations individuelles (pré-consensus).

Consensus

Réunis en petits groupes, ils doivent discuter de leurs appréciations en vue d’une décision collective (consensus).

Post-consensus

Dans un troisième temps, les groupes sont séparés et chacun se repositionne individuellement par rapport au matériel (post consensus).

Mesure de la prise de risque par questionnaire de dilemme sur les choix

L’instrument utilisé est le questionnaire de dilemme sur les choix pour mesurer la prise de risque. Ce questionnaire est toujours utilisé de nos jours, malgré quelques transformations. Il est composé de 12 saynètes, mettant en scène un dilemme de la vie quotidienne. Un personnage se trouve face à à celui-ci. Il doit faire le choix entre deux options. L’une des options est risquée, mais a des conséquences désirables si cela marche. Ces conséquences peuvent être un meilleur emploi, en succès, des profits importants. L’autre option est une option prudente mais avec des perspectives moins attrayantes.

L’outil fait comparer les scores donnés deux à deux. On effectue donc trois comparaisons.

On peut se référer à la psychologie cognitive à propos de la prise de décision sous incertitude, pour en savoir plus sur les raisons de certains choix.

Les sujets doivent indiquer à partir de quelle probabilité minimale de réussite de l’option risquée, il conseillerait au personnage fictif d’adopter cette solution du risque.

Après une première réponse, les participants regroupés par six doivent arriver à une conclusion unanime.

Exemple de situation utilisée dans l’outil

Par exemple, un électricien, marié, un enfant, travaille dans une grande entreprise depuis cinq ans. Il vient un emploi à vie avec un salaire correct mais modeste. Lors d’une convention, on lui propose un poste mieux payé avec une participation au capital dans une jeune entreprise. Si celle-ci résiste aux aléas du marché, il aura un travail plus intéressant et mieux payé. La probabilité raisonnable pour conseiller le choix risqué doit être évaluée entre 1/10 à 9/10.

Résultats : les réponses après discussion sont plus risquées

Dans 12 des 13 groupes étudiés, les réponses avaient évolué vers plus de risques comparativement aux positions individuelles avant la discussion. Au niveau individuel, 45 % conservent leur position initiale en poste est. 39 % d’entre eux changent leur opinion pour un risque plus élevé et 16 % ouvrons vers plus de prudence. C’est la première fois que ce 39 % ne prise de risque apparaît.

Les expériences de Myers, Rabbie et Visser mettent en évidence les conditions de la polarisation des attitudes

Principales conditions du déplacement du groupe vers le risque

Discussion et divergence des opinions produites

La polarisation résulte de la discussion qui permet de s’engager ou de s’impliquer avec les autres membres du groupe dans l’interaction. Cette discussion permet d’exposer les divergences d’opinion.

Expérience de myers

Dans le but de transmettre un avis sur la politique étrangère du président des États-Unis, Myers demande un avis à aux participants de son expérience à propos de l’interventionnisme militaire de celui-ci. Avant d’engager des discussions, il créait deux groupes dans lesquels il répartit les pacifistes, sous le nom des Colombes, et les plus belliqueux, prônant l’intervention militaire sous le nom des Faucons.

Il compose des groupes de quatre à cinq membres, répartis de façon homogène. On demandait à chaque groupe de produire un avis à transmettre. Ces groupes étaient ensuite dissous et recomposés, avec des faucons et colombes mélangés. Ces personnes doivent discuter d’un avis. Dans un troisième temps, on confronte des faucons et des colombes à de nouveaux colombes et faucons, en provenance d’autres groupes, avant de demander la formulation d’un nouvel avis.

Les résultats montrent que les personnes pacifistes le sont encore plus qu’avant la discussion. Les participants les plus belliqueux formulent des avis plus pacifistes après ces deux discussions avec les colombes, que les colombes elles mêmes. Parce que l’on analyse les contenus, on remarque que lors de la seconde discussion, les plus belliqueux revendiquaient davantage d’arguments pacifistes que ne pouvaient le faire les colombes.

La polarisation a ici pris place du côté pacifiste. Cela ne se fait pas d’être pour la guerre, on voit ici le poids des normes sociales dans la décision du groupe. Ceci confirme un des présupposés de base de shérif : la norme sociale vient réguler les rapports sociaux.

On peut donc effectuer l’interprétation suivante : tout ce qui diminue l’intensité et la fréquence des interactions sociales favoriserait le compromis. Tout ce qui permet la mise au jour de points de vue différents et leurs affrontements poussent à la polarisation, donc au changement et à l’interaction.

Importances de l’objet de la discussion (Rabbie et Visser 1972)

Les chercheurs ont créé des équipes de trois personnes, appartenant à des syndicats négociant trois questions :

  • l’échelle des salaires,
  • l’échelle des allocations vacances et
  • les indemnités de transport en voiture.

La première de question est la plus importante, et la troisième le moins. C’est la prime de la vie chère. Le résultat montre que les effets de polarisation sur les deux premières questions sont beaucoup plus accentués que pour la troisième. Pour celle-ci, il n’y a pas de polarisation mais un accord sur une moyenne.

Hiérarchie entre membres du groupe

On a précédemment vu des expériences sur les styles de leadership. Quels sont les effets du leadership sur la polarisation ?

Dans le cas d’un leader laisser-faire, la polarisation est la plus importante. Si le leader est autoritaire, la polarisation est la plus faible. De façon générale, sans leader, la polarisation est forte, contrairement aux groupes dans lesquels il y en a un.

*caractérisé par la convergence vers une valeur centrale

La polarisation concerne la prise de risque en groupe, mais aussi les attitudes et les jugements de valeur

Dans l’article précédent, nous avons vu que le Risky Shift est une polarisation des décisions de groupes vers des solutions socialement valorisées et plus innovantes lorsque les échanges pour prendre la décision favorisent l’exposition des opinions divergentes. La polarisation est d’autant plus forte que le sujet de la décision est important et dépend aussi du type de leadership dont bénéficie le groupe.

Systématisations des résultats

Une critique majeure de l’expérience est l’échantillonnage : constituée d’ingénieurs, les participants étaient considérés comme experts dans la prise de décision risquée.

Une expérience a été effectuée ensuite sur 218 étudiants d’art. Un groupe contrôle a été utilisé, dans lequel aucune discussion me prend place, c’est-à-dire aucun échange d’arguments ne s’effectue en vue de la décision à prendre. Dans le groupe tests, le post-consensus est plus risqué que le pré-consensus.

La discussion est-elle nécessaire à la polarisation ?

On propose trois scénarii de test.

Discussion et choix unanime

Le premier prend place avec une phase de discussions et une décision unanime ;

Discussion sans consensus

Le second s’effectue avec discussion mais sans consensus. L’accent est alors mis sur la production d’opinions diversifiées, selon le paradigme share-unshare. La durée de cette discussion est limitée à cinq minutes.

Consensus sans discussion, par votes successifs

Dans le troisième cas, le choix des participants était inscrit et un accord se fait par votes successifs, mais sans jamais discuter entre eux. Si un désaccord persiste, on a la possibilité de faire un autrefois qui est à son tour inscrit au tableau. À noter que cette méthode est employée sélectionner les professeurs dans les facultés.

Le risky shift apparait lorsque le groupe discute avant la prise de décision

Dans les deux premiers scénarios, là où il y a discussion, les décisions deviennent plus risquées. Là où il n’y en a pas, les décisions restent près de la moyenne. Le consensus oriente dans ce cas d’un compromis. L’augmentation de la prise de risque est retrouvée entre deux à six semaines après l’expérience, pour les 12 scénarii.

Ce phénomène d’augmentation du prise de risque est-il généralisable à autre chose que des prises de risques ?

Moscovici et Zavalon généralisent le concept de polarisation au changement d’attitudes

Jusqu’en 1969, on pensait que cet effet était limité à la prise de risque. À cette date, Moscovici et Zavalon le généralise en étudiant les discussions de groupe sur les attitudes. Il note en effet de polarisation des attitudes. Ces deux expériences ont porté sur les attitudes concernant le général De Gaulle et sur les Américains. Elles étaient composées elle aussi de trois phases. L’hypothèse des chercheurs était que les attitudes des groupes seraient plus extrêmes que celle des individus lorsque ceux-ci sont impliqués dans la tâche.

Expérience sur l’attitude vis à vis de la capacité de De Gaulle à gouverner

Un exemple d’items concernant le général De Gaulle est  » le général De Gaulle est trop âgé pour mener à bien sa difficile tâche politique ».

Pour impliquer les gens, on leur propose une échelle de mesure sur laquelle ils doivent se positionner. Il s’agit d’une échelle de Likert. Celle-ci est supposée impliquer les gens puisqu’on leur demande de s’investir personnellement, en répandant sur une échelle qui va de +3 à +3.

Une échelle de vicaire est opposée à l’échelle de Thurstone, qui propose une échelle allant de 1 à 7. Elle sert non plus à évaluer une position personnelle mais un caractère objectif, qui est l’aspect favorable ou défavorable de l’énoncé par rapport au sujet.

Elle est donc moins impliquante, car elle ne comporte plus de prise de position personnelle.

La polarisation est observée dans toutes les conditions du test d’autant plus que les répondants sont impliqués personnellement dans leur réponse

Dans les deux conditions, l’effet de polarisation est observé, avec des attitudes plus extrêmement en groupe. C’est un effet principal de variable, car le jugement est affecté quelle que soit l’échelle. Les valeurs sont cependant plus extrêmes lorsque le jugement a été mis sur une échelle de vicaire à propos de leurs propres attitudes, que dans l’autre cas. Autrement dit, les décisions en groupe sont plus extrêmes que seuls et ce d’autant plus que le questionnaire engage les gens. L’attitude devient encore plus forte après interaction.

En groupe, on observe plutôt une normalisation tenant compte des attitudes minoritaires, ou d’une position extrême si la tendance est initialement dominante dans le groupe

Pour les Américains, l’attitude est encore moins favorable. L’effet de polarisation a un effet d’extrémisme sur des jugements, ou de radicalisation des attitudes. Il n’y a pas de différence significative entre la phase de consensus et de post consensus. Ce n’est surtout pas un effet de normalisation, car le groupe conserve la position du groupe, qui est extrême et non pas moyenne.

Ces résultats peuvent être interprétés en tenant compte des attitudes minoritaires dans le groupe. Par opposition à l’effet de normalisation*, on obtient un effet de polarisation, définissable comme l’accentuation d’une tendance initialement dominante dans un ensemble de groupes. (Doise et Moscovici).

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